Je ne sais pas vous, mais un bon nanar de temps en temps, ça me fait un bien fou. Franchement, n'allez pas me dire que vous n'êtes pas émus devant la photo de Sean Connery en tournage pour Zardoz, en cuissardes improbables et en couche à cartouchières moule-bite. Je n'irai pas non plus jusqu'à me proclamer connaisseur, je suis tout au plus un amateur occasionnel et lecteur de nanarland pour la même raison que beaucoup d'autres, j'ai envie de me marrer. C'est hilarant, bon sang, non ? De voir des pantins en mousse hurler à la mort en tombant d'une falaise ? De suivre des intrigues philosophico-religieuses déclinées jusqu’à vous filer la gerbe de rire, ça aussi, c'est excellent ! Et puis ces répliques, bon sang... C'est aussi pour ça qu'on les regarde encore aujourd'hui, au-delà de tout fou rire à propos des costumes à chier et des coupes de cheveux que même la génération concernée par les années 80 n'a même pas osé tenter. C’est le décalage qui est génial, mais c'est aussi le côté vachement burné. Ça flingue à tout va, on ne comprend rien et on hurle des "ooooooooohh !" à chaque punchline cinglante. Eh bien, cette dernière phrase est un peu la définition même de Preacher, une série culte blindée de prix qui a trop de mal à trouver son public aujourd'hui. Parce que contrairement à un nanar, elle n'a pas le ridicule et le grotesque de la production fauchée, et qu'elle est trop sérieuse et presque trop bien torchée pour être risible. On flirte toujours entre les deux, en fait. Série culte badass, délire théologique, véritable exemple scénaristique, parodie provocatrice... Mais le fait est là : c'est de la bombe.
Peut-on résumer Preacher ? Non. Peut-on essayer quand même ? Allez, pour le fun. C'est l'histoire d'un ange qui a forniqué violemment avec une démone, donnant la vie à une entité appelée Genesis. Une nouvelle idée, ni Bien ni Mal, au pouvoir suffisamment puissant pour effrayer Dieu lui-même, qui emprisonnera cet enfant du péché ultime avant de s’enfuir. Mais Genesis s'est échappé et le voilà en train de posséder un pasteur américain du nom de Jesse Custer, alcoolique qui n'a jamais eu la foi mais officie quand même. La fusion, au passage, tue dans d'atroces souffrances tous les habitants du village mais dote Jesse d'un immense pouvoir. Quiconque entend la voix de Genesis par sa bouche obéira à l'ordre donné. Son but : retrouver Dieu et le mettre face à ses responsabilités, probablement en lui bottant le cul. Il est rejoint dans sa quête par son ex devenue tueuse à gages et un vampire irlandais, tous les trois poursuivis par un cow boy immortel appelé le « Saint des tueurs » puis par Tête-de-fion, un ado au visage déformé, pendant qu'un putsch se trame au Paradis et que Jesse tente de fuir son passé, surtout sa grand-mère tueuse en série qui l'a obligé à trouver la foi en l'enfermant dans un cercueil, vivant.
Non, non, ne partez pas ! Parce qu'en fait, c'est bien ! C’est sûr, si vous n’êtes pas sensibles à Zardoz, comment un pitch comme celui-ci pourrait vous parler ? Laissez-moi réessayer. Preacher n’est pas une série culte pour rien. Elle est véritablement géniale. Il faut déjà se remettre dans le contexte : une série aussi iconoclaste paraissant aux Etats-Unis, c’est aussi punk et couillu que de sortir en France un bouquin dont le héros serait un violeur d’enfants en série. Ben oui, fallait oser. Mais je vous entends me dire qu’on n’apprécie pas seulement une œuvre pour sa démarche. Alors ne tournons pas autour du pot.
Non, non, ne partez pas ! Parce qu'en fait, c'est bien ! C’est sûr, si vous n’êtes pas sensibles à Zardoz, comment un pitch comme celui-ci pourrait vous parler ? Laissez-moi réessayer. Preacher n’est pas une série culte pour rien. Elle est véritablement géniale. Il faut déjà se remettre dans le contexte : une série aussi iconoclaste paraissant aux Etats-Unis, c’est aussi punk et couillu que de sortir en France un bouquin dont le héros serait un violeur d’enfants en série. Ben oui, fallait oser. Mais je vous entends me dire qu’on n’apprécie pas seulement une œuvre pour sa démarche. Alors ne tournons pas autour du pot.
Le scénario poutre. Evidemment, on croise des tas de personnages tordus, comme le délicieux Jésus DeSade et son ingénieux garage à vélo, ou encore le clone trisomique du Christ, mais cette abondance de clichés ambulants, ridicules de sadisme ou de bêtise, n’est là que pour faire rire. Les relations qu’ils entretiennent, leurs buts, tout ça est d’une complexité maîtrisée, finalement. Ils servent tous une intrigue à tiroirs sinueuse teintée de menace ambiante. Il y a du danger, il y a du suspense et donc de l’enjeu, et c’est pour ça qu’on lit Preacher. Pour suivre les héros attachants, lâchés en pâture dans ce monde délirant crée par un Garth Ennis au top de sa forme et qui déteste toujours autant les héros conventionnels, d’une platitude affligeante. Eh oui, souvenez-vous, il est le génial inventeur de The Boys ! Autant dire que s’attaquer aux icônes, qu’elles soient judéo-chrétiennes ou issues de la pop culture, c’est son trip. Et voilà le résultat. Cette série est un concentré de violence inouïe tout autant que de physiques abîmés, d’histoires torturées et de vengeance représentées par un mélange de What the fuck, à moitié pour se moquer, à moitié pour devenir le prétexte à un bain de sang jouissif.
Je pourrais être plus complet que ça, bien sûr, mais ce serait idiot de vous gâcher le plaisir de la découverte. Parce que mine de rien, l’avantage de ce genre de personnages et d’intrigues incongrues, c’est que la surprise est totale. Une surprise constante, même. Ça devient d’ailleurs un intérêt monumental, à partir du moment où on comprend que l’on sera toujours étonné, on jubile en attendant la trouvaille suivante. Quand soudain, Tête-de-fion et tout à coup, Odin Quincannon. Bon sang, on en sursauterait presque à chaque fois, avant d’éclater de rire. Si vous n’êtes pas convaincus, je ne vois pas quoi faire d’autre que vous inviter à essayer le premier tome, lisez-le en bibliothèque ou achetez-le d’occasion, demandez un ticket à votre libraire en disant que c’est pour offrir, je ne sais pas. Vous serez obligés d’aimer, d’aduler, même, avant de citer Cassidy à tour de bras. Ou Jesse, d’ailleurs, qui n’est pas en reste. C’est quand même lui qui est à l’origine de mon insulte préférée.
« Lèche la merde de ton père qui reste sur ma bite, connard. »
... Oooooooooooooooooohhh !!!
Preacher Tome 1, Garth Ennis et Steve Dillon. Urban Comics, janvier 2015. 352 p, 28 €.
Sur le site de l’éditeur
Je pourrais être plus complet que ça, bien sûr, mais ce serait idiot de vous gâcher le plaisir de la découverte. Parce que mine de rien, l’avantage de ce genre de personnages et d’intrigues incongrues, c’est que la surprise est totale. Une surprise constante, même. Ça devient d’ailleurs un intérêt monumental, à partir du moment où on comprend que l’on sera toujours étonné, on jubile en attendant la trouvaille suivante. Quand soudain, Tête-de-fion et tout à coup, Odin Quincannon. Bon sang, on en sursauterait presque à chaque fois, avant d’éclater de rire. Si vous n’êtes pas convaincus, je ne vois pas quoi faire d’autre que vous inviter à essayer le premier tome, lisez-le en bibliothèque ou achetez-le d’occasion, demandez un ticket à votre libraire en disant que c’est pour offrir, je ne sais pas. Vous serez obligés d’aimer, d’aduler, même, avant de citer Cassidy à tour de bras. Ou Jesse, d’ailleurs, qui n’est pas en reste. C’est quand même lui qui est à l’origine de mon insulte préférée.
« Lèche la merde de ton père qui reste sur ma bite, connard. »
... Oooooooooooooooooohhh !!!
Preacher Tome 1, Garth Ennis et Steve Dillon. Urban Comics, janvier 2015. 352 p, 28 €.
Sur le site de l’éditeur