Pour l’article de cette semaine, j’ai décidé d’écumer mes étagères à la recherche de ce qui pouvait être un chef-d’œuvre à la fois culte et totalement méconnu. Oui, une envie, d’un coup. Lire des nouveautés palpitantes qui commencent à profiter d’une bonne campagne de presse et de bouche à oreille, c’est bien, on est toujours content de voir qu’un livre très bien se vend très bien. Mais sur le long terme, ils sont rares les ouvrages à ne pas tomber dans l’oubli en moins d’un an. C’est comme ça. On passe à autre chose parce que, bordel, il y a tellement de parutions par an qu’on se résigne à ne pas connaître de façon exhaustive les pépites des ces trois-quatre dernières années. Triste ? Pas du tout ! Quand on accouche d’un super livre, on doit forcément s’attendre à ce qu’il ait une durée de vie courte, quand on connaît bien le milieu. Ce qui est véritablement triste, c’est quand une œuvre est géniale, adulée pour une certaine strate de la population d’humble lecteurs, et qu’elle provoque tout de même chez le plus grand nombre une expression béate de total inconnu lorsqu’on en mentionne le nom. Froncement de sourcil, bouche en cul de poule, regard dans le vague… De quoi vous avez parlé ? De… Francis ? Non, connais pas.
Mais si, bon sang ! Francis, le blaireau farceur ! Non, toujours pas ? Boarf, laissez-moi combler vos lacunes, en tout bien tout honneur. Francis est une série de six albums très liés à la « collection Delphine » de chez Cornélius, tellement qu’ils ont tous profité d’une superbe réédition en 2013 à la sortie du dernier. Francis, c’est un blaireau. Un « blaireau farceur », selon le premier volume, mais on peut surtout dire que Francis est un salaud égoïste, violent, cynique, obsédé, un personnage délicieux qui vit tout un tas d’aventures palpitantes. Le principe, c’est que chaque planche s’ouvre par la même case : « Francis se promène dans la campagne ». Et « soudain », un truc absurde et imprévisible se produit, et lance l’histoire faramineuse dans laquelle notre blaireau s’est embarqué. Et c’est tout. C’est tellement simple que c’en est à pleurer. D’admiration, je veux dire. C’est loin d’être donné à tout le monde de pouvoir avoir une idée aussi débile qu’efficace.
Mais si, bon sang ! Francis, le blaireau farceur ! Non, toujours pas ? Boarf, laissez-moi combler vos lacunes, en tout bien tout honneur. Francis est une série de six albums très liés à la « collection Delphine » de chez Cornélius, tellement qu’ils ont tous profité d’une superbe réédition en 2013 à la sortie du dernier. Francis, c’est un blaireau. Un « blaireau farceur », selon le premier volume, mais on peut surtout dire que Francis est un salaud égoïste, violent, cynique, obsédé, un personnage délicieux qui vit tout un tas d’aventures palpitantes. Le principe, c’est que chaque planche s’ouvre par la même case : « Francis se promène dans la campagne ». Et « soudain », un truc absurde et imprévisible se produit, et lance l’histoire faramineuse dans laquelle notre blaireau s’est embarqué. Et c’est tout. C’est tellement simple que c’en est à pleurer. D’admiration, je veux dire. C’est loin d’être donné à tout le monde de pouvoir avoir une idée aussi débile qu’efficace.
Si je dis efficace, ce n’est pas seulement pour embellir la phrase. Francis est de ces albums qui déclenchent invariablement un rire, un sourire en coin au minimum, même lorsque vous vous retenez pour ne pas être pris pour un dingue en public. Ça repose sur plusieurs choses. La première case, tout d’abord. Il y a un je-ne-sais quoi d’hilarant avant même que ça ne commence, sûrement parce que quand on connaît le truc, on sait d’avance qu’un acte aussi insignifiant qu’un petit bond en campagne peut déclencher des catastrophes planétaires. Ensuite, il y a la deuxième case. C’est son décalage complet avec la première qui nous fait forcément rire. Comment passe-t-on de « Francis se promène dans la campagne » à « Soudain, il use de sa fonction de président des USA pour obtenir des faveurs sexuelles de ses collaboratrices », ou encore « Soudain, il fonde un groupe industriel dans un climat professionnel mais sympathique », seuls Claire et Jake le savent. Ce que c’est con. Sans parler du déroulement du reste de l’histoire, et sa conclusion épique. Sérieusement, c’est carrément désopilant.
Et bien sûr, ce qui tient du génie, c’est la faculté qu’ont les auteurs pour renouveler leur humour à chaque planche, y compris dans un seul album à la même thématique. On est toujours bluffé par l’inventivité du gag alors qu’on lit les dernières pages et que tout semble avoir déjà été fait. Parfois, l’humour y sera d’un potache basique au possible, ailleurs ce sera d’une ressemblance troublante avec la géopolitique de notre monde. Le truc, c’est que tout tient, une fois de plus, sur le principe du décalage complet entre réalité et potache. La même recette qu’Anouk Ricard et tant d’autres, une recette qui fonctionnera encore et toujours. En procès contre sa femme, paralysé des suites d’un AVC, en patron d’entreprise sans vergogne, en burn-out, à tendances suicidaires, Francis est l’archétype du mec normal dont on se moque parce qu’il est détestable, mais aussi et surtout parce qu’il nous ressemble quand même vachement, et que voir un blaireau vivre tout ça est franchement couillon. Ou parce que c’est toujours plus drôle quand ça arrive aux autres, aussi. Ouais, Francis est comme ça. Il réveille notre humour noir endolori par des dizaines d’années de conventions sociales. Merci, Francis.
Et bien sûr, ce qui tient du génie, c’est la faculté qu’ont les auteurs pour renouveler leur humour à chaque planche, y compris dans un seul album à la même thématique. On est toujours bluffé par l’inventivité du gag alors qu’on lit les dernières pages et que tout semble avoir déjà été fait. Parfois, l’humour y sera d’un potache basique au possible, ailleurs ce sera d’une ressemblance troublante avec la géopolitique de notre monde. Le truc, c’est que tout tient, une fois de plus, sur le principe du décalage complet entre réalité et potache. La même recette qu’Anouk Ricard et tant d’autres, une recette qui fonctionnera encore et toujours. En procès contre sa femme, paralysé des suites d’un AVC, en patron d’entreprise sans vergogne, en burn-out, à tendances suicidaires, Francis est l’archétype du mec normal dont on se moque parce qu’il est détestable, mais aussi et surtout parce qu’il nous ressemble quand même vachement, et que voir un blaireau vivre tout ça est franchement couillon. Ou parce que c’est toujours plus drôle quand ça arrive aux autres, aussi. Ouais, Francis est comme ça. Il réveille notre humour noir endolori par des dizaines d’années de conventions sociales. Merci, Francis.
En définitive, Francis, c'est un peu le pote lourdaud qu'on se traîne sans trop savoir pourquoi. Impossible à sortir, jamais là pour nous sauf quand ça l'arrange, l'enfoiré de base dont on se demande pourquoi on l'aime encore. Il mérite clairement sa condition de blaireau. Mais le fait est qu'on l'aime ! C'est comme ça, c'est tout. Et là se trouve bien la magie de la chose : Francis est irrésistible, peu importe ses frasques à répétition. Comme je le disais, la série entière est une œuvre culte, à lire absolument si vous voulez vous payer une bonne tranche et vous moquer du monde entier. Qui sait si, au détour d'une visite dans sa campagne, Francis ne vous invitera pas à boire des coups en se moquant des pauvres. Quoique non. Francis, payer ses coups ? Faut pas rêver.
Francis blaireau farceur, Claire Bouilhac et Jake Raynal. Cornélius, août 2013. 64 p, 8,50 €.
Francis veut mourir, Claire Bouilhac et Jake Raynal. Cornélius, août 2013. 40 p, 8,50 €.
Francis cherche l’amour, Claire Bouilhac et Jake Raynal. Cornélius, août 2013. 64 p, 8,50 €.
Francis sauve le monde, Claire Bouilhac et Jake Raynal. Cornélius, août 2013. 48 p, 8,50 €.
Francis rate sa vie, Claire Bouilhac et Jake Raynal. Cornélius, août 2013. 40 p, 8,50 €.
Francis est malade, Claire Bouilhac et Jake Raynal. Cornélius, août 2013. 48 p, 8,50 €.
Sur le site de l’éditeur
Francis blaireau farceur, Claire Bouilhac et Jake Raynal. Cornélius, août 2013. 64 p, 8,50 €.
Francis veut mourir, Claire Bouilhac et Jake Raynal. Cornélius, août 2013. 40 p, 8,50 €.
Francis cherche l’amour, Claire Bouilhac et Jake Raynal. Cornélius, août 2013. 64 p, 8,50 €.
Francis sauve le monde, Claire Bouilhac et Jake Raynal. Cornélius, août 2013. 48 p, 8,50 €.
Francis rate sa vie, Claire Bouilhac et Jake Raynal. Cornélius, août 2013. 40 p, 8,50 €.
Francis est malade, Claire Bouilhac et Jake Raynal. Cornélius, août 2013. 48 p, 8,50 €.
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